vendredi 2 septembre 2011

Dorothy Parker, Hymnes à la Haine

Chers Amis du Potager,

Je vous avais parlé, il y a quelques temps, du petit recueil du Pingouin consacré aux nouvelles de Dorothy Parker, et intitulé The Sexes. J’en avais profité pour vous dire tout le bien que je pensais de cette étonnante conteuse, à la plume acérée.

Cathulu ayant eu l’excellente idée de signaler la sortie en poche, chez Phébus, des Hymnes à la Haine, je n’ai pas su résister (si faible, suis-je…) et m’y suis donc plongée aussitôt.

Bien m’en a pris, car la Dame, surnommée The Wit, n’a absolument pas usurpé sa réputation de satiriste cruelle et affreusement drôle.

Dans ces poèmes affûtés, Mrs. Parker allume tour à tour : les femmes, les hommes, la famille, les actrices, les tire-au-flanc, les bohêmes, le bureau, les acteurs, les raseurs, le théâtre, les fêtes, les films, les livres, les jeunes loups, les résidences d’été, les épouses, les maris, les étudiants et les réformateurs. Personne n’y échappe, donc, et tout le monde en prend copieusement pour son grade.

Tous les portraits esquissés sont merveilleusement féroces, car terriblement vrais. Nous avons tous, en effet, déjà rencontré, des « vrais mecs », pour qui « la femme parfaite est celle qui recoud les boutons avant même qu’ils soient décousus », ou encore les athlètes « bourrés de globules rouges et autres merveilles… Ils mangent leur viande plus que crue, passent leur temps à ouvrir les fenêtres et peinent à s’arracher à leurs douches froides. Ce sont peut-être les Rois du Biceps, mais si vous leur tombez sur le râble à l’improviste pour leur demander qui a découvert l’Amérique ils doivent se torturer les méninges ».

Il y a aussi les belles-sœurs (« les seules choses qu’elles ne disent pas sur votre compte sont celles qu’elles ne savent pas dire, faute de vocabulaire »), les tragédiens (« ceux grâce à qui Shakespeare s’est fait une célébrité… »), les médiums (« ils ne sont certains que d’une chose : ils ont l’esprit doué de clairvoyance… A supposer qu’ils en aient un »), le « film d’art à trois dollars la place » (« la photographie est toujours mauvaise, les acteurs paraissent évoluer dans un brouillard épais, l’intrigue aussi. »).

Je ne sais pas si ça vous a donné l’envie de vous frotter à The Wit, mais si ce n’est pas le cas, c’est que j’aurais mérité, moi aussi, d’être diaboliquement démolie par cette grande Dame.

Sa causticité fait des merveilles, la langue est belle et jamais critiques n’auront été formulées avec autant de vigueur. Jouissif.

Lisez-le (en plus, ce n’est pas long, 106 courtes pages sans hypocrisie, ça vaut le coup).

Mademoiselle Potiron

Hymnes à la Haine (Hate Verses), par Dorothy Parker, Phébus Libretto, 106 pages, 10 euros (qui les valent bien)

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