lundi 7 janvier 2013

Agnès Michaux et Anton Lenoir, Death is a star


Chers Amis du Potager,

Après Francis veut mourir et le Coup du lapin, d’aucuns pourraient penser que j’abuse en vous présentant aujourd’hui un ouvrage sous-titré la Mort, sa vie, son œuvre (les autres me jetteront un regard de commisération en hochant la tête et me glisseront discrètement la carte de visite de leur psychiatre préféré, les truffes).

Mon goût pour le macabre (raccord avec la saison) n’a rien de morbide. C’est juste que j’ai l’humour subtil (tendance grand-breton) et noir (tendance André Breton).

Agnès Michaux et Anton Lenoir sont d’ailleurs sans doute affligé de ce même sens de l’humour un tantinet absurde puisque leur somme consacrée à la faucheuse est particulièrement tordante, en plus d’être instructive. Une gageure avec un thème pareil.

Présenté comme de classiques miscellanées, cet ouvrage fort complet vous renseignera sur les us et coutumes funéraires, sur l’histoire des cimetières célèbres, sur les œuvres ayant la mort pour héroïne (au cinéma, en littérature, en peinture, en sculpture), sur le vocabulaire du fossoyeur, sur la géographie des Enfers chez les Grecs anciens, entre autres.

Les pipoles sont aussi au rendez-vous, avec au choix leur dernier repas (la soupe de lentilles, c’est trop mortel), leurs dernières paroles (avec parfois un sens de l’à-propos tout à fait saisissant), ou les souhaits qu’ils ont pu confier à des magazines concernant leur dernière heure.

Vous y aurez la confirmation que l’alcool, c’est mal (la drogue aussi, hein), notamment avec la petite anecdote arrivée à la femme de William Burroughs (et qui a peut-être inspiré les scénaristes de Skyfall au passage). Que la famille n’est pas la solution à tout (demandez donc à Marvin Gaye) et que la nécrophilie requiert de ne pas avoir l’odorat délicat. Et on vous dévoilera les petites vacheries dont de roublards agonisants sont encore capables.

D’autres passages, plus émouvants (à la condition que John Cleese ne soit pas de service), sont consacrés à des oraisons funèbres, à des testaments comme celui de Victor Hugo. Vous apprendrez aussi pourquoi Sophie Berthelot gît au Panthéon, à côté de son chimiste de mari (une belle histoire d’amour comme on n’en fait plus, ma pauv’ dame).

Le tout est illustré de gravures, photos, affiches macabres à souhait.

Bref. De quoi vous instruire et vous bidonner, quoi.

Attention, cependant : la lecture de cet ouvrage en public est déconseillé (j’ai testé, ma collègue qui m’avait naïvement demandé « tu lis quoââââ ? », m’a regardée bizarrement après que je lui ai montré la couverture. Ahem).

Mademoiselle Potiron

Death is a star, par Agnès MICHAUX et Anton LENOIR, Flammarion 2012, 424 pages mortelles, 19.90 euros.

Dr. Borée, Loin des villes, proche des gens


Chers Amis du Potager,

(Bon, OK, la couv' est pas terrible, mais on ne juge pas un orthopédiste à sa blouse)

Tout d’abord, puisqu’il s’agit d’une tradition, je vous souhaite une excellente année. Que vos légumes s’épanouissent dans vos carrés potagers.

Ensuite, il faut que je vous parle de Borée. Cet excellent médecin de campagne, de la même veine que la resplendissante Jaddo, en version rat des champs, s’est dépatouillé pour nous permettre de faire dédicacer son non moins excellent ouvrage.

D’où une rencontre fort conviviale, avec un auteur intelligent, sympathique, et très abordable malgré l’aura quasi mythique qui l’accompagne. Anonymat oblige, vous ne saurez rien de plus (à part que c’était très bien, que ses dédicaces sont vraiment personnalisées et qu’il est charmant).

Pour ceux qui voudraient se faire une idée de la pratique médicale dans notre riante campagne, son ouvrage, qui reprend certains articles parus sur son blog, est une bible. On y (re-)découvre une médecine à taille humaine, qui doit s’accommoder de sa patientèle et des détours bucoliques. C’est aussi l’occasion pour ces praticiens ruraux de pratiquer des actes plus étrangers aux généralistes des villes (où le réflexe est de se précipiter aux urgences ou chez le spécialiste) : petite chirurgie (celles des plaies et bosses) et surtout gynécologie, entre autres.

Car Borée, en plus de rafistoler les jeunes casse-cous et de retaper de sympathiques petits vieux polypathologiques, défend une médecine respectueuse pour tous, et notamment des femmes. Avec lui, vous découvrirez que les étriers peuvent être laissés à l’équitation et que la pince de Pozzi n’est pas une fatalité (bon, si vous êtes un mec, ça ne vous fera ni chaud ni froid, mais pour une fille, ça peut compter).

Avec ce recueil, vous passerez du rire aux larmes, de la colère à l’enthousiasme. La vraie vie, quoi.

En plus, le style est bien trouvé, l’écriture magnifique. Comme je le disais à propos de Jaddo, vous en sortirez meilleurs et votre médecin vous remerciera de ne pas venir séduire le virus de la gastro en poireautant dans sa salle d’attente pour votre rhinite J+1. 

Et en plus, des dessinateurs plein de talent ont su illustrer le propos avec à-propos (Boulet, Camomille et Mipou, pour ne citer qu'eux). Et Martin Winckler s'est fendu d'une préface drôle et émouvante à la fois.

Mademoiselle Potiron

PS : en plus, la dédicace m’a donné l’occasion de rencontrer Babaorum et même de lui faire la bise. Même qu’il dit des choses gentilles tout plein sur son twitter sur ce modeste potager. Même qu’il a été re-twitté par Borée himself. Même que j’en suis toute émue. Même que j’en profite pour le remercier de tout cœur.

PS2 : (j’en profite, hein) les dédicaces de noël ont beaucoup plu à leurs destinataires. Merci encore à Borée pour sa disponibilité et sa gentillesse.

Loin des villes, proche des gens, chroniques d’un jeune médecin de campagne, par Dr BOREE, City 2012, 255 pages, 14.95 euros (qui les valent bien)