Chers Amis du Potager,
Voilà un court roman policier, type du roman noir américain des années trente à cinquante, écrit, en six week-ends, par un Anglais qui n’a jamais mis les pieds aux Etats-Unis, mais à l’aide d’un dictionnaire d’argot US.
Un tel hybride pourrait être une gentille plantade. Devrait être une gentille plantade. Mais non.
Miss Blandish (dont on ignorera jusqu’au bout le prénom) est la fille du milliardaire John Blandish, qui va lui offrir, pour ses fiançailles, une rivière de diamants valant dans les 50.000 dollars. Autant dire, pour l’époque, que son possesseur pourra vivre tranquille jusqu’à la fin de ses jours.
Voilà pourquoi Riley et sa bande (Bailey et le vieux Sam) décident de piquer le collier de la demoiselle, au détour d’un bois, après la réception pour les fiançailles.
Seulement les choses ne se passent pas comme prévu : Bailey abat le falot fiancé, la bande doit kidnapper Miss Blandish et, pire que tout, elle s’est fait repérée par Eddie, du gang Grisson, qui viendra reprendre Miss Blandish pour réclamer un million de rançon à papa.
Seulement voilà. Si le gang Grisson est dirigé d’une main de fer par M’man Grisson, son fiston, surnommé Slim, se prend de passion pour Miss Blandish. Il faut dire que Slim a tout du prince charmant : le cheveu gras, la lippe molle, la silhouette dégingandée, l’intellect proche de celui du bigorneau, et le sadisme imaginatif.
Pour garder son emprise sur son rejeton, M’man va devoir user de moyens subversifs pour que Miss Blandish se prête aux perversités de Slim.
Voilà pour le point de départ de cette histoire. Un peu glauque ? Du tout.
Si James Hadley Chase n’a jamais connu le Kansas, son roman est aussi efficace que ceux de Chandler ou Hammett. Car l’enquête sur la disparition de Miss Blandish, après que la police a fait chou blanc, est confiée à un détective, assisté d’une gironde secrétaire. Et que les bandits tirent dans tous les coins, que les effeuilleuses lâchent le morceau à la seule évocation de Broadway, que ça explose, avec humour, vieux malfrats racornis, cadavres enterrés au pied d’un arbre, mafieux reconvertis et roi du surin.
Le vocabulaire use effectivement de l’argot du milieu, sans que cela paraisse trop artificiel (sauf dans certains passages, mais c’est peut-être une erreur de traduction, comme à l’évocation du « casier à gants » d’une voiture).
Même si ça n’atteint pas le niveau des chefs-d’œuvre que sont pour moi le Grand sommeil (pour le coup, la traduction de Boris Vian est délicieuse) et le Faucon maltais, c’est un très bon roman noir, classique dans sa construction, bien élaboré, avec lequel on peut passer un excellent moment.
Mademoiselle Potiron
Pas d'orchidées pour Miss Blandish (No orchids for Miss Blandish), par James Hadley Chase, Folio Policier, 293 pages, 6,80 euros
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