Chers Amis du Potager,
Sukkwan Island bénéficie d’un avantage : ce court roman est publié par Gallmeister, gage de qualité s’il en est. Les critiques l’ont apprécié, au point de lui décerner le prix Médicis étranger 2010. Et les LCA, dont je suis, ont largement exposé tout le bien qu’elles en pensaient dans leurs blogs respectifs.
Il était donc dans l’ordre des choses que, édité dans la collection Totem, il finisse dans ma PAL (merci à Papa Noël pour cette charmante attention), PAL où il n’a pas eu à attendre longtemps pour être lu (à la différence de certains, je sais).
Pour parfaire ce préambule, sachez seulement que j’y allais sans autre a priori que de savoir qu’il s’agissait d’un roman « fort », m’étant abstenue d’en lire des résumés bourrés de spoilers.
Pour planter un peu le décor, disons qu’un beau jour, Jim, dentiste raté, père absent et époux volage, décide d’aller vivre un an sur une île paumée d’Alaska, accessible par hydravion, histoire de se refaire une virginité, découvrir son vrai moi. Tout un programme. Partant du principe que « plus on est de fou, plus on rit », il convainc son fils de 13 ans (Roy) de l’accompagner dans l’aventure. En réalité, Roy n’a accepté que par crainte de voir son père se suicider s’il refuse. Vous avouerez que, quand ça commence comme ça, c’est mal parti.
D’autant que Jim n’a rien d’un Castor Junior, que la plupart de leurs réserves alimentaires sont boulotées par un ours dans la première semaine, que le bois pourri de l’île pourra difficilement alimenter un feu convenable, que la radio ne fonctionne pas. Et que tous soirs, allongé dans son duvet, Roy entend son père sangloter sur ses histoires d’amour calamiteuses et son impossibilité de garder son engin dans son slip dès qu’un jupon passe à l’horizon. Pathétique.
En clair, au bout de 10 pages, on devine déjà que tout finira mal. Reste à savoir quand surviendra la catastrophe et sous quelle forme elle se présentera. Sans vouloir spoiler, disons qu’on ne sera pas déçu.
Pourtant, malgré l’intense pression dramatique (j’ai dévoré les 200 pages en une soirée), j’ai eu du mal à m’attacher à Roy et Jim pataugeant sur leur île. Il faut dire que le comportement de Jim m’a davantage poussée à l’énervement qu’à l’apitoiement. Et curieusement, Roy non plus ne m’a pas séduite.
Malgré la beauté de la nature environnante, j’en ai plus gardé une impression de pourrissement, d’obscurité et de désolation. A la différence d’Indian Creek, où le héros ne dispose pas de beaucoup plus de matériel que Jim et Roy, où il neige en quasi permanence, mais où tout conserve une luminosité intrinsèque, Sukkwan Island dégage un relent d’hostilité sournoise.
Bref, un roman haletant, de grande qualité, mais qui laisse une impression de malaise palpable, révélatrice du talent de David Vann, dont la biographie explique bien des choses.
Mademoiselle Potiron
Sukkwan Island, par David VANN, Gallmeister, collection Totem, 200 pages, 8,50 euros
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