Chers Amis du Potager,
Sylvie, chez Quai des Brumes, de
son propre aveu, n’est pas trop amatrice de bande dessinée. Pourtant, elle a le
chic pour dénicher l’album parfait. C’est ça, le talent. La preuve par deux
exemples, dans des genres très différents.

Ce qu’il y a de fascinant, c’est
qu’à partir d’une histoire très simple (chercher un ami dans un lieu public),
David Prudhomme nous offre une vision à la fois pure et décalée du Louvre. Pure
parce que les salles sont reproduites et que l’on s’amuse à reconnaître les
œuvres sur chaque planche (la Dentelière de Vermeer, le fringuant Saint Jean Baptiste
de Léonard ou le décédé Saint Jean Baptiste d’Andrea Solario, le Scribe), et
les célèbres salles, comme la Cour Marly, la Grande Galerie ou la salle des
Cariatides.
Décalée, parce que s’y superpose
la confrontation permanente entre le touriste, le visiteur, et les œuvres. Si
la Joconde est entrevue, David Prudhomme nous propose l’envers du décor, avec
ce que Mona Lisa, elle, voit tandis qu’on la contemple : un troupeau de
touristes, plus ou moins béats, plus ou moins bovins, avec les Noces de Cana en
toile de fond.
Les visiteurs contemplent les
œuvres, y trouvent parfois un reflet, telle cette jeune femme à lecteur mp3,
qui prend des notes avec son stylet sur sa tablette tactile, dont le profil
fait face à celui du Scribe, dans une symétrie saisissante. Ou ce couple
asiatique assis dans l’embrasure d’une fenêtre, à côté d’un couple d’Egyptiens
antiques.
Très peu de textes, dans ce
magnifique guide graphique, où les couleurs sont douces, presqu’estompées,
nimbées d’un halo singeant le fameux flou artistique. Tout est effacé, et
pourtant criant de vérité, presque palpable. Vraiment un très bel ouvrage.

Le dessin est volontairement
sobre. Les histoires se concentrent autour d’actions quotidiennes :
attendre le bus, monter dans le bus, payer, s’asseoir, descendre du bus. A
priori pas de quoi faire tout un recueil. Pourtant, l’humour absurde et le goût
pour le surréalisme de Paul Kirchner apporte toujours la petite touche de
fantaisie ou de poésie qui frappera le lecteur. On y découvre également la vie
privée du bus, qui attend le début de sa tournée accoudé dans un bar.
A ce titre, la première planche
est révélatrice : l’homme attend le bus. Une inondation envahit peu à peu
le décor. Pour ne plus avoir les pieds dans l’eau, l’homme grimpe sur le poteau
de l’arrêt de bus et d’y assoit. Le bus arrive alors, en roulant sur l’eau.
Cela ne vous rappelle rien ? Il y a du Miyazaki dans cette scène, comme
lorsque Chihiro attend le train qui s’élance sur la mer étale.
C’est vraiment très drôle (si
l’on aime l’absurde), et beaucoup des planches, sous couvert de faire rire,
contiennent des réflexions sur le sens de la vie (comme diraient les Monty
Python) ou sur l’imbécilité de certains de nos comportements. Une belle
découverte donc.
Et qu’est-ce qu’on dit ?
Merci Sylvie !
Mademoiselle Potiron
La Traversée du Louvre, par David PRUDHOMME, Futuropolis et les éditions du Louvre, 80 pages, 17 euros ;
Le bus (the bus), par Paul KIRCHNER, Librairie Tanibis, 96 pages, 15 euros
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