mercredi 29 août 2012

Empereurs des ténèbres et Noir Océan (brrrrr...)


Chers Amis du Potager (s’il y a encore quelqu’un sur ce blog en jachère…)

Comme vous pouvez vous en douter, j’ai bôôôôôcoup de retard dans mes articles (il faut dire que depuis avril, j’ai ouvert quelques ouvrages…), il ne faudra donc pas m’en vouloir si je me contente de tirs groupés. Bon, d’accord, j’en vois qui râlent, là, dans le fond, mais ne vous inquiétez pas, vous devriez pouvoir trouver ici de bonnes idées de lecture. Bref.

Pour commencer, un hommage à mon dealer préféré, Monsieur Arnaud, qui a encore frappé. Et à plusieurs reprises (quand je vous disais qu’il était récidiviste…). Re-bref.

Commençons par Empereurs des Ténèbres, d’Ignacio del Valle (chez Phébus, collection Libretto). Après Nager sans se mouiller, je dois dire que je trouve la littérature policière espagnole plaisante. Nous voilà dans les environs de Leningrad, sur le riant front de l’est donc, au cours de la seconde guerre mondiale.

Notre héros est soldat de la division azul, envoyée par Franco (je rappelle qu’officiellement, l’Espagne était neutre, hein) pour soutenir son copain Adolf face aux vilains bolchéviques. Est-ce utile de préciser que nos amis les Germains traitent les Espagnols avec un mépris sans borne et que les relations entre les deux états-majors sont tendues ?

Un jour de dégel, les chevaux échappés d’une écurie se noient dans la rivière. Parmi eux, le cadavre d’un homme. Accident ? On peut en douter car l’homme, non seulement a été égorgé proprement, mais a été scarifié d’une inscription menaçante en espagnol « prends garde, dieu te regarde ». Arturo Andrade, ancien lieutenant dégradé, mais qui a oublié d’être bête, se voit confier l’enquête.

C’est un roman bien épais, mais très bien écrit (effet page turner garanti). L’ambiance est rendue avec art, le style plaisant. Même si le fil de l’intrigue se dévoile un peu avant la fin, il sait conserver un aspect percutant et dynamique qui ne gâche rien. En outre, pour les amateurs du genre, le front de l’est est assez bien rendu (tant pour le côté « viens par ici la gueuse », que pour le côté « qu’est-ce qu’on mange ? », ou encore « devine qui vient nous bombarder ce soir »), la présence intermittente de personnages plus comiques allège le contexte difficile.

Un seul bémol : la traditionnelle femme fatale trop belle pour être vraie, et qu’on retrouve trop souvent dans les polars écrits par ces messieurs… Et les nazis sont un peu tous de glaçants psychopathes blonds et pâlichons (comme si un nazi pouvait être autre chose que glaçant, psychopathe, blond et pâlichon, n’est-ce pas ?). On va dire que c’est pour planter le décor.

Mais sinon, c’est vraiment très bien. Parole de potiron.

Dans un tout autre style, Noir Océan a eu une réception plus mitigée. Il faut dire que c’est le récit d’une dérive.

A la suite d’événements que je n’expliquerai pas (sous peine de spoiler lamentablement), sachez qu’un cargo islandais se retrouve perdu en pleine tempête, sans radar, sans radio et sans GPS (et sans George Clooney). Ses neufs occupants (et le chien) ont tous des secrets inavouables (sauf le chien), quand ils n’ont pas carrément une personnalité franchement borderline.

Niveau intrigue, c’est velu. Parce que chacune de ces têtes de bois fait tout pour accumuler encore plus d’emmerdements que le destin (pourtant pas avare) ne s’amuse à en distribuer à leur cargo. Au bout d’un moment, on se dit qu’une poisse pareille, ça devrait être interdit par la convention de Genève. D’ailleurs, à l’exception du cuistot (un naïf), ces hommes sont des têtes à claque auxquelles je ne me suis pas trop attachée (trop eu envie de leur coller des baffes).

Question style, là, c’est le pompon pour Potiron. L’idée est louable, d’aucuns (bien éduqués) la trouveront plaisante. Elle m’a frustrée. En effet, il s’agit d’un récit polyphonique, émaillés de références bibliques (alléluia !), où au cours de 9 chapitres successifs, on peut avoir le récit détaillé de ce qu’ont pu faire chacun des 9 marins pendant la même période de temps. ET LA SUITE, ALORS ?! Bien fichu, mais frustrant au possible pour un potiron impatient, donc.

Consolons nous avec la description délicate de la lutte acharnée, presque charnelle, du cargo contre l’océan, joli morceau de bravoure romanesque. Qui contraste avec une écriture nerveuse, presque virile (même si les livres, comme les anges, n’ont pas de sexe), reflet de l’ambiance testostéronée qui règne à bord.

Bref, plutôt un bon roman pour mâle dominant que pour frêle bergère en jupons fleuris. Même si je connais des bergères qui aiment quand le sang coule. Parce que j’ai le sentiment qu’il s’agit d’un bon roman, qui saura plaire, mais qui ne me convenait peut-être pas trop. Un peu comme Tout est sous contrôle, d’Hugh Laurie.

Mademoiselle Potiron

Empereurs de Ténèbres, par Ignacio DEL VALLE, Phébus collection Libretto
Noir Océan, par Stefan MANI, Folio Policier, 544 pages, 8,10 euros

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