Chers Amis du Potager (s’il y a
encore quelqu’un sur ce blog en jachère…)
Comme vous pouvez vous en douter,
j’ai bôôôôôcoup de retard dans mes articles (il faut dire que depuis avril,
j’ai ouvert quelques ouvrages…), il ne faudra donc pas m’en vouloir si je me
contente de tirs groupés. Bon, d’accord, j’en vois qui râlent, là, dans le
fond, mais ne vous inquiétez pas, vous devriez pouvoir trouver ici de bonnes
idées de lecture. Bref.
Pour commencer, un hommage à mon
dealer préféré, Monsieur Arnaud, qui a encore frappé. Et à plusieurs reprises
(quand je vous disais qu’il était récidiviste…). Re-bref.
Commençons par Empereurs des Ténèbres, d’Ignacio del Valle
(chez Phébus, collection Libretto). Après Nager
sans se mouiller, je dois dire que je trouve la littérature policière
espagnole plaisante. Nous voilà dans les environs de Leningrad, sur le riant
front de l’est donc, au cours de la seconde guerre mondiale.
Notre héros est soldat de la
division azul, envoyée par Franco (je rappelle qu’officiellement, l’Espagne
était neutre, hein) pour soutenir son copain Adolf face aux vilains
bolchéviques. Est-ce utile de préciser que nos amis les Germains traitent les
Espagnols avec un mépris sans borne et que les relations entre les deux
états-majors sont tendues ?
Un jour de dégel, les chevaux
échappés d’une écurie se noient dans la rivière. Parmi eux, le cadavre d’un
homme. Accident ? On peut en douter car l’homme, non seulement a été
égorgé proprement, mais a été scarifié d’une inscription menaçante en espagnol
« prends garde, dieu te regarde ». Arturo Andrade, ancien lieutenant
dégradé, mais qui a oublié d’être bête, se voit confier l’enquête.
C’est un roman bien épais, mais
très bien écrit (effet page turner
garanti). L’ambiance est rendue avec art, le style plaisant. Même si le fil de
l’intrigue se dévoile un peu avant la fin, il sait conserver un aspect
percutant et dynamique qui ne gâche rien. En outre, pour les amateurs du genre,
le front de l’est est assez bien rendu (tant pour le côté « viens par ici
la gueuse », que pour le côté « qu’est-ce qu’on mange ? »,
ou encore « devine qui vient nous bombarder ce soir »), la présence
intermittente de personnages plus comiques allège le contexte difficile.
Un seul bémol : la
traditionnelle femme fatale trop belle pour être vraie, et qu’on retrouve trop
souvent dans les polars écrits par ces messieurs… Et les nazis sont un peu tous
de glaçants psychopathes blonds et pâlichons (comme si un nazi pouvait être
autre chose que glaçant, psychopathe, blond et pâlichon, n’est-ce pas ?).
On va dire que c’est pour planter le décor.
Mais sinon, c’est vraiment très
bien. Parole de potiron.
Dans un tout autre style, Noir Océan a eu une réception plus
mitigée. Il faut dire que c’est le récit d’une dérive.
A la suite d’événements que je
n’expliquerai pas (sous peine de spoiler lamentablement), sachez qu’un cargo
islandais se retrouve perdu en pleine tempête, sans radar, sans radio et sans
GPS (et sans George Clooney). Ses neufs occupants (et le chien) ont tous des
secrets inavouables (sauf le chien), quand ils n’ont pas carrément une
personnalité franchement borderline.
Niveau intrigue, c’est velu.
Parce que chacune de ces têtes de bois fait tout pour accumuler encore plus
d’emmerdements que le destin (pourtant pas avare) ne s’amuse à en distribuer à
leur cargo. Au bout d’un moment, on se dit qu’une poisse pareille, ça devrait
être interdit par la convention de Genève. D’ailleurs, à l’exception du cuistot
(un naïf), ces hommes sont des têtes à claque auxquelles je ne me suis pas trop
attachée (trop eu envie de leur coller des baffes).
Question style, là, c’est le
pompon pour Potiron. L’idée est louable, d’aucuns (bien éduqués) la trouveront
plaisante. Elle m’a frustrée. En effet, il s’agit d’un récit polyphonique,
émaillés de références bibliques (alléluia !), où au cours de 9 chapitres
successifs, on peut avoir le récit détaillé de ce qu’ont pu faire chacun des 9
marins pendant la même période de temps. ET LA SUITE, ALORS ?! Bien fichu,
mais frustrant au possible pour un potiron impatient, donc.
Consolons nous avec la
description délicate de la lutte acharnée, presque charnelle, du cargo contre
l’océan, joli morceau de bravoure romanesque. Qui contraste avec une écriture
nerveuse, presque virile (même si les livres, comme les anges, n’ont pas de
sexe), reflet de l’ambiance testostéronée qui règne à bord.
Bref, plutôt un bon roman pour
mâle dominant que pour frêle bergère en jupons fleuris. Même si je connais des
bergères qui aiment quand le sang coule. Parce que j’ai le sentiment qu’il
s’agit d’un bon roman, qui saura plaire, mais qui ne me convenait peut-être pas
trop. Un peu comme Tout est sous contrôle,
d’Hugh Laurie.
Mademoiselle Potiron
Empereurs de Ténèbres, par Ignacio DEL VALLE, Phébus collection Libretto
Noir Océan, par Stefan MANI, Folio Policier, 544 pages, 8,10 euros
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire