mercredi 29 août 2012

Ivy Compton-Burnett et Dorothy L. Sayers (a cup of tea, my dear?)


Chers Amis du Potager,

Pour la bonne bouche, voici quelques vieilles Anglaises. Parce qu’on a toujours besoin d’un soupçon de british touch.

Tout d’abord, l’Excellence de nos aînés (oui, je sais, le titre est affreux, on dirait un nom de maison de retraite), par Ivy Compton Burnett, est un roman psychologique qui dissimule, sous son élégance de ton, une satire sociale des plus virulentes.

Deux familles, les Donne et les Calderon, deviennent voisines. Le patriarche Benjamin Donne a en effet souhaité se rapprocher de ses sœurs Sukey, malade du cœur, et la douce Jessica. Le voilà donc qui emménage avec enfants, cousine et domestiques. C’est précisément le décès de tante Sukey qui va précipiter le drame entre les deux familles, laissant percer les caractères les plus vils et les plus abjects.

Composé presqu’exclusivement de dialogue, c’est à travers eux qu’Ivy Compton Burnett dévoile avec maestria les bassesses de ses personnages, dont les paroles et les contradictions révèlent les traits de caractère. Cruauté, vanité, bêtise, avarice, inconsistance transpirent à travers les belles paroles et les attitudes compassées de la bonne société. C’est si bien rendu qu’on en arrive au dégoût de ces monstres du quotidien, prêts à tout et n’hésitant pas à piétiner leurs victimes.

Et les plus odieux ne sont pas forcément ceux que l’on croit.

Un roman terrifiant (dans le bon sens du terme), réalisé avec un art consommé du dialogue, et parfaitement maîtrisé. Un fort bel ouvrage, foi de Potiron !

Dans un genre tout à fait différent, Dorothy Sayers, dans la tradition inaugurée par les Agatha Christie et Margery Allingham, nous présente son détective à elle, Lord Peter Wimsey. A mi-chemin entre Bertie Campion (pour l’intelligence et les fréquentations) et Bertie Wooster (pour le côté célibataire à majordome distingué et à parentèle femelle encombrante), Lord Peter collectionne les livres rares et s’adonne, pour son loisir, à l’art de l’investigation policière.

Pendant que son ami l’inspecteur Parker enquête sur la disparition mystérieuse du riche Reuben Levy, Peter vient à la rescousse de Monsieur Thipps, brave homme qui au retour d’une soirée arrosée découvre dans sa baignoire le cadavre d’un inconnu, nu comme un ver à l’exception d’un pince-nez en or. Ce qui a de quoi déstabiliser l'Anglais le plus flegmatique, vous en conviendrez.

Après s’être assuré que le cadavre en question n’est pas celui du sieur Levy, Lord Peter et Parker décident de collaborer dans leurs enquêtes respectives, partant du principe qu’un œil neuf est parfois utile.

Je n’en dirai pas davantage sur l’intrigue en tant que telle, très adroite, pour me concentrer sur notre héros bondissant. Tout comme les deux Bertie précédemment cités, Peter est un brave garçon, intelligent et léger, qui admet volontiers pratiquer à titre d’amateur et non pas, comme le pauvre Parker, pour gagner sa vie. D’où une certaine nonchalance décomplexée qui lui est parfois utile.

Bref, c’est plein de charme et d’humour, et Dorothy Sayers prouve qu’elle ne dépareille pas dans la collection des grandes dames du crime qui ont fleuri dans la première moitié du XXe siècle.

Mademoiselle Potiron

L'excellence de nos aînés (Elders and Betters), par Ivy COMPTON BURNETT, Phébus, 336 pages, 24 euros
Whose Body?, par Dorothy Leigh SAYERS, NEL

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